Le Rwanda, souvent en butte à une condescendance feinte ou à une défiance savamment entretenue, semble incarner cette figure du paria non point pour ses prétendues fautes, mais parce qu'il dérange, parce qu'il défie des paradigmes éculés, parce qu'il contrarie des narrations préétablies.

Ce pays, par la vision de son leadership, la rigueur de sa gouvernance, la résilience de son peuple et l'ambition lucide de son projet national, dément l'image convenue d'une Afrique que l'on voudrait éternellement captive de ses tragédies, prisonnière de ses errements.

Or, cette success-story agace, car elle rappelle crûment à d'autres nations, y compris les plus puissantes, leurs propres contradictions, leurs échecs et leur propension à sanctuariser l'injustice sous des dehors de neutralité.

La scène internationale, loin d'être ce forum d'équité et de raison que l'on prétend, est souvent un théâtre d'ombres où se jouent les hypocrisies les plus raffinées. Les crises africaines y sont disséquées avec une partialité méthodique, et les analyses y sont biaisées par des prismes commodes qui occultent les véritables causes des convulsions régionales.

L'on préfère blâmer des gouvernements pourtant légitimes, vilipender des leaderships pourtant éclairés, plutôt que d'affronter l'évidence d'un ordre mondial dont les dés sont pipés, d'un jeu où les règles ne sont appliquées qu'aux faibles, et d'une morale à géométrie variable qui absout les torts des puissants tout en accablant les autres de présomptions infamantes.

Ainsi, l'on feint de ne pas voir les amalgames, les soutiens obscurs à des forces déstabilisatrices, les intérêts mercantiles qui sous-tendent bien des postures diplomatiques.

L'on feint d'ignorer les responsabilités historiques de ceux qui, hier encore, façonnaient l'avenir des peuples à la pointe du canon et qui, aujourd'hui, prétendent leur dicter la voie à suivre. À cet égard, la myopie volontaire des grandes puissances et de certaines institutions internationales face aux dynamiques réelles des conflits contemporains en Afrique est moins une preuve d'ignorance que d'une complicité tacite.

Mais l'histoire, toujours, finit par confondre les impostures et par révéler les véritables artisans de progrès. Que l'on le veuille ou non, la grandeur ne se décrète pas, elle s'impose. Et si le Rwanda, malgré vents et marées, continue de s'affirmer comme une nation qui se dresse, qui bâtit, qui inspire, alors c'est que le jugement du temps finira par triompher des méprises du présent.

Tite Gatabazi



Source : https://fr.igihe.com/L-inconfort-de-l-excellence-et-l-aveuglement-des-nations.html