Au Burundi, Alain Guillaume Bunyoni ne passait pas inaperçu et il faisait tout pour paraître.

Natif de Kanyosha à Bujumbura en 1972, il rejoint le maquis en 1995. Devenu Général, il est membre du parti CNDD- FDD.

Il a été tour à tour inspecteur général de la police, ministre de l'Intérieur, Chef de cabinet civil du défunt Président Nkurunziza puis Premier ministre sous le nouveau Président Ndayishimiye.

Mais il est plus connu comme un affairiste. Il concentre à lui tout seul toutes les critiques qu'on peut formuler sur les dérives d'un système politique.

Il est l'un des responsables de la répression sauvage qu'a connu le Burundi lors du coup d'état manqué de 2015.

Et les Etats Unis l'avaient mis sur la liste des sanctions.

Il était sous le feu des critiques tant au sein du parti lui-même et à l'extérieur. Mais il n'en avait cure. Au cœur du dispositif sécuritaire du Burundi depuis 2003, il était devenu incontournable. Et se vivait comme intouchable.

Devenu Premier ministre, il se sent pousser les ailes. Il ambitionne d'être calife à la place du calife. Et la rivalité entre lui et le Président se joue sur la place publique.

Et à l'intérieur même du parti au pouvoir, deux camps s'affrontent en fonction des allégeances. Ceux qui soutiennent le Président, dit modéré et les faucons qui s'alignent derrière Bunyoni.

On raconte qu'il serait le Burundais le plus fortuné. Et il exhibe sa richesse sur les réseaux sociaux. Quelle indécence dans un pays aussi pauvre.

Des biens mal acquis par la corruption, les détournements des deniers publics et les interférences dans les marchés publics.

Des organisations de la société civile, les chancelleries étrangères, des articles de presse avaient révélé la surfacturation des équipements de la police, le détournement de la ratio des policiers, des policiers fictifs sur la liste de paies et les trafics de minerais en provenance de l'Est de la RDC.

On raconte même qu'il était en affaires avec les FDRL pour des livraisons d'armes. Des quantités d'armes commandées pour le compte de la police burundaise étaient pourtant destinées aux FFDRL en échanges des lingots d'or.

Ce dernier va jusqu'à contrarier les décisions du Président. Il est dépourvu de scrupules.

Le pays était ainsi traversé des tensions qui n'ont de cesse de s'accentuer.

Depuis deux ans qu'il est au pouvoir, le Président Ndayishimiye connaît des sabotages de son action et il sait que c'est son Premier ministre qui est aux manettes.

Ce dernier a des velléités de lui succéder et il piaffe d'impatience.

Et le 2 septembre profitant de la rentrée judiciaire, le Président sonne la charge.

Il y dénonce ouvertement la tentative de putsch avec une allusion à peine voilée.

Mais il prépare sa revanche dans le plus grand secret.
On sentait qu'il jouait l'opinion contre son Premier ministre. En fait non, il préparait l'opinion aux changements.

Hier, un décret présidentiel nommait un nouveau chef de cabinet civil du Chef de l'Etat.

Les députés ont été priés de se présenter à 8 h 30 au palais de Kigobe pour un travail important, sans plus de précision.

A l'ouverture de la séance, le Président de l'Assemblée nationale livre un message du président de la République qui demande aux députés d'approuver le candidat Premier ministre, actuel ministre de l'Intérieur et de la sécurité, le Lieutenant Général Gervais Ndirakobuca.

Le vote a lieu à l'unanimité. Pas une seule voix ne manquait.

L'approbation par le président de la République et la prestation de serment a lieu dans la foulée.
Les premiers changements, affectent la police nationale. Tous les commissaires de police au niveau de la province ont changé de responsabilités. C'était le bastion de sieur Bunyoni.

Le Président Ndayishimiye vient d'éviter une crise supplémentaire. Il a pris de court ses adversaires qui fomentaient un coup d'état et le nouveau Premier ministre aussitôt elue par le Parlement a prêté serment.

Un fruit ne tombe que quand il est mûr. Mais, face à l'ouragan de l'histoire, mure ou pas, il tombe quand même, disait en son temps, le Marechal Président Mobutu.

Mais la page Bunyoni n'est pas encore tournée. Reste à savoir ce que le pouvoir lui réserve. Sa côte de popularité était au plus bas au sein de l'opinion.

Il est mal en point avec l'opinion publique qui supporte mal son affairisme

Tite Gatabazi



Source : https://fr.igihe.com/Burundi-la-chute-d-un-parvenu.html