Ce dernier n'est pas une frontière cher frère, du fait qu'elle naturelle. Puisque nous sommes en famille, puis-je directement m'adresser à toi jeune frère dont je tais le nom pour éviter que tu ne sois frustré. Toi jeune homme qui, poussé par une haine instillée par des politiques qui se la coule douce à 2.500 Km de chez toi, que dis-je, de chez nous a Birere, ce quartier populaire de Goma.

C'est ce garçon, rappelez-vous qui, aux côtés de centaines d'autres jeunes gens de son âge qui, endoctrinés par des discours de haine tous azimuts descendit le drapeau du Rwanda au siège de la Banque de Développement des Etats des Grands lacs, BDGL, le 30 Octobre dernier, pour ensuite le bruler côté RD Congo à la frontière qui porte bien son nom car, petite barrière, en signe de provocation après les accusations farfelues de Kinshasa du soutien de Kigali à la rébellion du M23.

Ton intention était, clamait-tu, d'annihiler au propre comme au figuré, d'annihiler le pays de Paul Kagame, bouc émissaire premier des discours de haine made in Kinshasa. Je ne me souviens pas de ton nom, et Dieu me garde m'en souvenir car, tu n'es qu'une victime parmi tant d'autres et un exemple également de ce que peuvent faire de nous les politiques véreux, extrémistes et va-t'en guerre ; ces politiciens qui instrumentalisent tout.

Cher frère, vous réagissez au quart de tour sur des injonctions bellicistes des ventriotes dont les intérêts financiers sont à l'opposé du vrai patriote que tu es. Ils se foutent complétement de ce que tu deviendras demain, pourvu que leurs comptes en banques soient crédités, et fournis, encore et encore, quand sur ta litière tu dors des fois le ventre vide, les tirs de mitrailleuses crépitant dans ta région, son excellence monsieur l'honorable qui t'as envoyé aux avant-postes des manifestations, sirotant son champagne, bien assis dans son transat un pied au-dessus de l'autre, à Gombe au bord du fleuve.

Toi et moi ne sommes que des va-nu-pieds dont les moyens de survie dépendent des caprices du climat pour nous autres, et ou à la sueur de nos fronts après avoir trimé dur, pour les autres.

Sors la tête de l'eau et reviens à la raison petit frère !

Avant la venue des colons, nos territoires étaient un et juxtaposés, de même en allait il de notre continent, n'avaient pas de frontières. Tu traversais le lac pour t'approvisionner chez moi et inversement.

Mon grand-père évoquait souvent le faste des célébrations de mariages dans nos familles respectives dans lesquelles ils se conviaieent, soit ici ou de l'autre côté du lac. Qu'est-ce qu'ils s'amusaient bien ensemble ! Et voilà quant à nous cher frère où nous en en sommes réduits toi et moi ; c'est triste !

Et, en 1885, les colonisateurs se départagèrent nos pays, divisant et séparant familles et régions, sans tenir compte des liens de parenté et d'affinité qui nous unissaient.

Ainsi l'est de la RD Congo devint Congolais, une partie du Bugesera collée au Burundi, et pourtant Rwandais. C'est ainsi aussi qu'une partie de la région de l'Akagera en Tanzanie et une autre du Bufumbira en Ouganda, furent annexés à ces pays, réduisant en un petit bout de chagrin le pays des mille collines.

Le colon avait trouvé un pays puissant et une organisation politique hors pair qui n'avait rien à envier à la leur. C'est ainsi que sont nées les frontières et l'écartement des familles ; untel se retrouvant Congolais lorsque son frère ou sa sœur de sang doté d'une autre nationalité et entre eux une frontière physique ou virtuel les séparant. C'est ce qui s'appelle " Diviser pour régner. " Ils nous ont eu cousin !

Toi dont le grand père avait des liens de consanguinité avec le mien, ils avaient d'ailleurs tous les deux signé un pacte de paix à l'ancienne cela va sans dire. Pour quelles raisons t'en prends-tu à moi, moi ton cousin germain, alors que nous avons des liens de sang. Tout nous unis au lieu de nous diviser.

Ceux qui t'envoient à la casse à la petite barrière n'ont rien à foutre, ni de ta dignité, ni de tes lendemains qui déchantent cher petit frère. Pour eux, tu n'es qu'un instrument de leurs appétits voraces d'accéder au pouvoir suprême, pour ensuite te laisser croupir dans ta misère, leurs objectifs atteints.

Balle au sol frangin ! On est un toi et moi, je te le répète.

Le processus de tolérance et de réconciliation tant dans la vraie vie que dans les cœurs nous prendra du temps, il est vrai.
Nous devrons être patients, très patient, et laisser de côté la colère et la haine ; laisser derrière nous ces querelles intempestives pour focaliser l'avenir, un avenir radieux si toi et moi y mettons du nôtre, en restant soudés et en refusant de prêter oreille à ces suceurs de notre sang et pseudo-politiciens. Salut petit frère et que Dieu nous garde de la guerre !

Jean Jill Mazurru



Source : https://fr.igihe.com/Lettre-a-un-frere-Congolais.html