Bien que le chantage migratoire ait pris une ampleur nouvelle depuis la crise de 2015, l'Union européenne a contribué à créer les conditions de sa propre vulnérabilité.

Depuis plusieurs semaines, la Finlande accuse la Russie d'amener des migrants à sa frontière en représailles à son adhésion récente à l'OTAN.

Cette instrumentalisation de l'immigration vise à influencer la situation intérieure et la sécurité des frontières en Finlande et dans l'UE, selon le Premier ministre finlandais.

Il en découle que la question migratoire est devenue un sujet sensible au sein de l'UE, et les pays tiers, non-membres, l'utilisent pour exercer des pressions.

Un exemple notable est celui de la Pologne, qui en novembre 2021, a accusé la Biélorussie d'avoir orchestré une crise migratoire à ses frontières.

Ces pays tiers ont compris qu'ils avaient un pouvoir sur l'Europe en utilisant stratégiquement la migration, même en faisant transiter un petit nombre de personnes.

Pour comprendre la situation actuelle, il est essentiel de revenir à la crise migratoire de 2015, qui a révélé les dysfonctionnements de l'UE en matière d'asile. L'Union européenne a cherché à empêcher les arrivées massives en passant des accords avec des pays tiers, tels que la Turquie, pour stopper les départs depuis leurs côtes.

Cependant, ces pays tiers ont compris qu'ils pouvaient tirer parti de cette situation. Par exemple, la Turquie a utilisé cette position pour négocier des concessions de l'UE en échange de sa coopération sur la question migratoire.

Ainsi, l'Europe a transféré une partie de sa souveraineté en matière d'immigration.

Le Maroc a également compris comment utiliser le levier migratoire pour faire pression sur l'Espagne en 2021, en laissant passer des migrants en réponse à un différend politique.

En multipliant ces accords avec des pays tiers, l'Europe a créé les conditions de sa propre fragilité face à ces tentatives de déstabilisation. L'Union européenne est devenue vulnérable car les États membres ne parviennent pas à s'entendre sur une politique d'immigration commune.

Le Pacte Asile et Immigration, discuté depuis près de sept ans, pourrait harmoniser les règles sur les contrôles aux frontières, la gestion des demandes d'asile et des retours. Cependant, il existe une crainte que les résultats des élections européennes de l'année prochaine poussent les gouvernements à adopter rapidement ce pacte pour montrer qu'ils gèrent l'immigration, même si une telle gestion totale est impossible.

En fin de compte, il est nécessaire d'adopter une approche plus humaniste dans le traitement de la question migratoire et de s'attaquer aux racines des migrations tout en coupant l'herbe sous le pied des populistes qui exploitent les peurs liées à l'immigration. Cela nécessite une coopération internationale basée sur la compréhension des réalités migratoires du monde contemporain.

Tite Gatabazi



Source : https://fr.igihe.com/L-Europe-et-immigration-Entre-responsabilite-et-vulnerabilite.html