C'est en 1895 que les Allemands, sous la direction de Gustav Adolf von Götzen, sont arrivés au Rwanda. Les historiens considèrent souvent que le Rwanda a été l'un des derniers pays africains à être colonisé. Les premiers colonisateurs allemands, en arrivant au Rwanda, se sont surtout concentrés sur le soutien au roi Musinga, alors au pouvoir.

La présence allemande au Rwanda a été marquée par des périodes où des Rwandais perdaient la vie simplement pour avoir soutenu leur roi, jusqu'à l'éclatement de la Première Guerre mondiale, qui a vu le départ du roi pour le front.

En 1900, des prêtres catholiques ont fait leur entrée au Rwanda, apportant avec eux l'enseignement de la religion et d'autres savoirs. Cependant, ces enseignements étaient empreints de principes discriminatoires, tant régionaux qu'ethniques.

Mgr Léon-Paul Classe et André Perraudin ont été parmi les figures de proue de l'Église catholique au Rwanda, enseignant notamment au petit séminaire Saint-Léon de Kabgayi et au grand séminaire de Nyakibanda. Cependant, l'histoire montre qu'ils ont dû faire face à des divisions et des schismes.
En juin 1916, vers la fin de la Première Guerre mondiale, les Allemands, dirigés par le capitaine Wintgens (Tembasi), se sont retirés face aux forces belges supérieures en nombre, conduisant ainsi le Rwanda sous le contrôle colonial belge."

Les rwandais ont vécu des moments extrêmement sombres

"Contrairement aux colonisateurs allemands, les Belges ont adopté une politique radicalement différente lors de leur arrivée au Rwanda. Ignorant le roi, ils imposaient directement leurs ordres aux Rwandais, les obligeant à s'engager dans divers travaux.

Durant leur domination, les colonisateurs belges étaient soutenus par les chefs religieux catholiques. Ces derniers favorisaient les Tutsis, les élevant à des positions de pouvoir. Cela était particulièrement évident dans les plantations de thé et de café, où les Rwandais étaient forcés de travailler. En cas de non-achèvement du travail, les punitions étaient sévères, une pratique connue sous le nom de " shiku ".

Cette politique, résumée par l'expression " Mbatanye mbategeke ", a permis aux Belges de convaincre les Hutus que les Tutsis les opprimaient depuis longtemps et qu'il était temps d'y mettre fin.
L'idéologie raciste prônée par Mgr Classe, qui trouvait un écho favorable chez les Belges, s'est répandue dans les écoles et d'autres sphères de la vie publique.

La soi-disant révolution de 1959, menée par les Hutus avec le soutien de l'Église catholique, a entraîné des persécutions contre les Tutsis. Leurs maisons furent incendiées, leurs biens pillés et certains furent tués. Ce fut le prélude à l'indépendance du Rwanda en 1962, une indépendance encore marquée par la présence de colonialistes belges.

Le président d'Ibuka, le Dr Gakwenzire Philbert, critique les dirigeants rwandais du passé pour leur vision à court terme, soulignant leur adhésion continue aux principes du colonialisme, au détriment de l'unité et du développement du pays.

Il déclare : " Lorsque les colons sont arrivés au Rwanda, ils ont établi des écoles. L'école, appelée Indatwa en kinyarwanda, formait un groupe officiel d'érudits. Cependant, les diplômés de ces écoles étaient principalement des 'assistants', destinés à servir les Blancs. En conséquence, les dirigeants des Première et Deuxième Républiques, bénéficiant d'une éducation, considéraient les autres Rwandais comme leurs assistants plutôt que comme des acteurs du développement du pays. "

Un exemple frappant est celui du ministre du MINITRAPE, Nzirorera Joseph, qui a interdit à l'Université Centrale du Rwanda, en particulier à sa branche SCAP, de délivrer des diplômes d'" Ingénieur ", afin d'empêcher l'émergence de diplômés pouvant rivaliser avec son propre niveau d'éducation."

Le rôle de l'Etat dans la ségrégation ethnique dans les écoles

En 1969, sous la présidence de Grégoire Kayibanda, le Conseil central du Parti Parmehutu a pris la décision d'instaurer un contrôle de la domination ethnique dans les écoles rwandaises. La mise en œuvre de cette politique a débuté au cours de l'année scolaire 1972-1973.

Antoine Mugesera, un ancien élève de l'école du Christ-Roi à Nyanza, rapporte que le directeur de l'établissement, le Père Chanoine Ernotte, s'est adressé au président Kayibanda dans une lettre datée du 21 février 1973. Il lui demandait les raisons de cette surveillance de la domination ethnique dans les écoles secondaires et s'interrogeait sur les meurtres de Tutsis intellectuels.

En réponse, Kayibanda affirmait que ce programme d'inspection avait été approuvé par l'Administration nationale et devait être appliqué sans entrave.

Durant cette période, plusieurs élèves tutsis, y compris Yosiya Senyonga, qui avaient réussi l'examen d'entrée à l'Université nationale du Rwanda, se sont vu refuser l'accès à l'enseignement supérieur.

À partir de février 1973, il est devenu extrêmement difficile pour les enfants tutsis d'accéder à l'Université centrale du Rwanda. Les lycéens tutsis ont commencé à être persécutés, tandis que ceux qui travaillaient pour le gouvernement ou dans le secteur privé étaient progressivement licenciés.

Cette politique a conduit à une véritable tragédie nationale : l'élimination des Tutsis instruits et la fuite des survivants vers des pays voisins tels que l'Ouganda, le Burundi et la République démocratique du Congo.

En parallèle, un autre phénomène a émergé : le remplacement de postes par des individus issus de familles favorisées par les dirigeants, un processus marqué par la corruption et le népotisme. Cette situation a représenté une perte significative pour le pays, car les individus compétents étaient écartés au profit de personnes moins qualifiées."

La politique de discrimination est sans issue

De l'époque coloniale belge jusqu'à la Première République, les partis politiques rwandais étaient principalement basés sur des critères ethniques, favorisant majoritairement les Hutus, souvent désignés comme 'le peuple'. À l'exception du parti UNAR, la plupart des politiciens de cette période ont privilégié des politiques discriminatoires et divisionnistes, conduisant in fine au génocide contre les Tutsis.

La Deuxième République, instaurée en 1973 sous la présidence de Juvénal Habyarimana, prétendait corriger les erreurs de son prédécesseur, Grégoire Kayibanda. Cependant, elle a continué à suivre une ligne politique similaire.

Mis à part 13 hommes politiques et quelques autres figures notables qui se sont opposés au plan de génocide contre les Tutsis en 1994, en dénonçant l'injustice et en luttant pour la vérité, la majorité se sont alignés sur la politique du gouvernement de l'époque.

Lors de la clôture de la 29ème semaine de commémoration du Génocide perpétré contre les Tutsi, le Ministre de l'Union des Rwandais et de la Société Civile, Jean Damascène Bizimana, a souligné que peu de politiciens, non impliqués dans les persécutions, ont eu le courage de s'opposer à la politique meurtrière. Il a affirmé que sans les extrémistes du 'Hutu Power', il n'aurait pas été possible de tuer plus d'un million de Tutsis à travers le pays.

Outre les victimes de ce génocide, de nombreux Tutsis ont également été tués lors de tentatives de génocide antérieures les années d'avant 1994.

L'économie rwandaise, entre 1973 et 1980, a connu un ralentissement de sa croissance, passant de 6,5% à 2,9%, tendance qui s'est poursuivie jusqu'en 1990. De 1990 à 1994, l'économie a subi une récession moyenne de 40 %, affectant gravement la santé du pays.

Après la libération du pays, le FPR-Inkotanyi a stoppé le génocide et s'est retrouvé face à un pays vidé de ses ressources. Depuis lors, le Rwanda a entrepris un long chemin de reconstruction et affiche désormais un espoir de développement sur la scène internationale."

Bazikarev



Source : https://fr.igihe.com/Rwanda-Cent-ans-de-calvaire-et-un-avenir-prometteur.html