" Je ne nie pas le génocide des tutsi ", clame-t-il, mais ses écrits, eux, trahissent une autre vérité, une vérité empreinte d'ambiguïté et de révisionnisme. Car ce sont dix-neuf citations précises, extraites de son ouvrage controversé, Rwanda, la vérité sur l'opération Turquoise : quand les archives parlent enfin, qui l'amènent aujourd'hui devant les juges.
Un livre qui tente, sous le couvert de l'investigation, de diluer la tragédie dans un récit où les guillemets encadrent le terme " génocide " comme une ironie silencieuse.
Dans cet ouvrage, Charles Onana n'hésite pas à qualifier la planification du génocide contre les tutsi comme l'une des " plus grandes escroqueries de l'histoire du XXe siècle ". Une affirmation audacieuse, dangereuse, qui trouve écho dans les discours négationnistes traditionnels : " Je ne nie pas, mais⦠".
Un stratagème bien connu pour semer le doute, pour masquer une vérité douloureuse sous le voile de l'ambiguïté intellectuelle. L'auteur cherche à détacher les massacres du Rwanda du génocide des Juifs, tentant de minimiser, de réviser l'histoire sous prétexte d'une analyse critique.
Face à cette rhétorique corrosive, des témoins se succèdent, parfois balbutiant, se perdant dans des justifications laborieuses, comme le Général Jean-Claude, commandant de la très controversée opération Turquoise qui avait offert un sanctuaire aux génocidaires, frappé par une soudaine amnésie lorsqu'il s'agit de rappeler que parmi les réfugiés terrifiés, se trouvaient aussi les bourreaux, les chefs orchestrant le génocide.
La politique de la terre brûlée, méthodiquement planifiée, encadrait cette masse populaire en fuite, dirigée par les autorités, les militaires, et les Interahamwe jusque dans les camps de l'Est du Zaïre. Mais le général ne se souvient plus, ou peut-être ne veut-il pas se souvenir.
Johan Swinnen, ancien ambassadeur belge au Rwanda, fait une intervention troublante : " On avait des indices⦠". Il évoque les listes de tutsi à abattre, les caches d'armes, l'entraînement des milices. Des éléments indiscutables d'une planification froide et minutieuse, mais que certains continuent de ne pas voir, comme si ces preuves étaient invisibles.
A ceux qui lui rappellent les télex alarmants qu'il envoyait dès 1992, évoquant un " état-major secret prêt à éliminer la minorité tutsi ", il s'enfonce dans des explications confuses, laborieuses, échappant au sens même de ses propres avertissements.
Et que dire de Joseph Matata, ce défenseur des droits humains, dont l'apparition à la barre enfonce encore plus profondément le clou de la confusion ? Risible, diront certains, tant son discours semble dévier de l'objet du procès, se perdant dans des conjectures alambiquées qui ne font qu'exacerber l'impatience des magistrats.
Derrière son masque de défenseur des droits, se cache un agenda politique clair, semant le doute plutôt que d'éclairer les faits. Ses indignations sélectives résonnent comme des échos lointains d'une rhétorique déjà rouillée, depuis longtemps contredite par les décisions de la justice internationale et par des recherches rigoureuses comme celles du Professeur Duclert.
Les témoins, dit-on, sont à l'image de ceux qui les appellent. Et les témoins d'Onana, eux, titubent dans un dédale de mots, incapables de défendre une cause déjà perdue. Pendant ce temps, Onana, acculé, fait volte-face. Face à l'évidence des faits, il se rétracte, abandonne sa cause avec amertume, conscient que le tribunal ne se laissera pas berner par des à-peu-près, des amalgames, et encore moins par des contre-vérités.
Et c'est là tout le mérite de la justice : remettre chacun à sa place. Les voix de ceux qui tentent de réécrire l'histoire, d'effacer l'infamie du génocide contre les tutsi, sont ramenées à la raison par la force de la vérité, par la solidité des preuves et par la rigueur du jugement.
Parce que la justice, tout comme la mémoire des victimes, ne se soumet pas aux tentatives de falsification.
Tite Gatabazi
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